PANNE

Hier, Marabout s'est levé du pied gauche...
4h30, appel du muezzin. Raté! le café est déjà servi, le tapalapa tartiné de beurre salé et de confiture de bisaap.
Dans une autre vie, je ferai muezzin. Je me lève souvent bien avant la mosquée...
L'océan est houleux, le ciel nuageux. Toute la nature transpire déjà des prémices de l'hivernage.
Le soleil se lève, timide et frileux. 27 degrés au thermomètre, quand-même!
J'ai promis à mon vieux Defender de lui offrir une balade en brousse. Une errance dans le Saloum avec trois nouveaux potes, rencontres de hasard quand le hasard fait bien les choses...
Sinon que mon ancêtre anglais ne l'entend pas de cette oreille. Le Saloum, il connaît par cœur, lassé de ma tendresse particulière pour cette région fantastique.
Au retour de Djifer, après une balade pourtant pédestre jusqu'au bout du bout de la fragile presqu'île, ma "grand-mère" me lâche!
Elle tousse, éructe, crache et vomit toute l'huile du carter sur la piste de Ngalou.
Mention spéciale évidemment pour la solidarité, la téranga, la débrouillardise et l'ingéniosité en bricolage des sénégalais.
Deux petites heures de mécanique, de rires, de jeux avec les mômes du quartier plus tard, nous repartons pour de nouvelles aventures.
A quelques kilomètres de Samba Dia où nous attend Marie pour un cochon de lait simple et somptueux à la fois, le Defender joue "le retour de la panne". Version tans en cinémascope et technicolor, dolby surround, mouettes, pélicans, martin pêcheur et flamants roses en guest stars.
Une heure de Jakarta plus tard, on file, affamés au jardin du petit resto local de Marie.
" Le retour du retour de la panne" se jouera à Fimela, puis, encore, entre Djilas et Loul Sesene, sur le goudron.
Là, le Land rend son âme à dieu sans que je puisse vous préciser lequel...
Trois petites heures à regarder lune, étoiles et lueurs du feu allumé sur la piste aux zébus en attendant Alioune, mon mécanicien-remorqueur attitré...
Les troupeaux de zébus dans la clairière ont meuglé, une hyène a rigolé et les mouts-mouts ont sucé. Le temps s'est arrêté, le temps d'une nuit.
Pardon Pierre, désolé Fatou, nio far Olivier, ce n'est qu'un rendez-vous reporté.
Encore trois autres heures à se traîner lamentablement mais sûrement jusqu'à l'atelier avant de pouvoir prendre une douche aux alentours de minuit.
Ce qu'il y a de bien avec l'Afrique, c'est qu'il se passe toujours quelque-chose. Principalement de l'imprévu.
Cet imprévu vous offre des galères, parfois. Mais souvent des rencontres, des rires, des gosses sur le genoux, des souvenirs rigolos, surréalistes, mémorables.

(aquarelle Elissa Sue)