AMINATA

9 Janvier 2017

Mademoiselle Aminata est Guinéenne. De Tamatara, en banlieue de Conakry.
Elle a quitté la concession familiale avec quelques milliers de fcfa collectés par les siens.
"Va à Dakar, à Saly, à Kédougou et envoie des Western" lui a dit son père en la conduisant à la gare routière...
Rien d'explicite pour vous dans ces mots couverts de sous-entendus?
"Va vendre ton corps ma fille et envoie l'argent à ta famille"
C'est tout de suite plus clair?
Dakar, Saly, il y a des bars, des boites de jour. De nuit aussi. Des trottoirs, de l'argent qui circule. Qui n'a ni odeur ni couleur.
Des toubabs en goguette, des maris volages, des vicieux, des naïfs, des religieux en mal de sexe, des gazous friqués,...
A Kédougou, aux mines d'or et chez les orpailleurs de la région de Sabodala ce n'est pas la même chanson!
Bordels à ciel ouvert, paillasses sordides, hygiène inexistante, racket, esclavage sont de mise.
L'enfer!
Vers Sambrambougou, on ne cultive plus! Les enfants ne vont plus à l'école. On creuse, on tamise, on cherche de l'or!
Des centaines de prostituées se relaient 24h sur 24 pour, parfois, quelques fcfa, une poussière du métal précieux.
On viole, on séquestre, on tue aussi.
Kédougou, c'est moins cher que Mbour ou Dakar. C'est moins loin.
Alors, Aminata est allée à Sabodala...
Salie mais vivante, la jeune femme de 21 ans n'a pas envoyé de mandat à sa famille. Elle a économisé jusqu'à ce qu'elle puisse s'enfuir, prendre un car rapide et débarquer à la gare routière de Mbour.
Là, sans papiers, elle s'est fondue dans la communauté Guinéenne. Une copine la loge sur un vieux matelas de mousse verte qu'elle redresse contre le mur du palier avant que la maison ne s'ébroue...
Hier, elle a rencontré mon copain Jean-Philippe. Un brave gorgui de Champagne. Un veuf qui a vendu sa société de pompes funèbres...
Amminata a envoyé 20000fcfa par Wari à Conakry...

(aquarelle Aurore Lagirarde)