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La Lorgnette du Margouillat

BAOBAB SACRÉ

BAOBAB SACRÉ

La Vieille Anglaise emprunte fréquemment le goudron entre Joal et Samba Dia. En dehors des pistes, c'est l'une des deux routes pour quitter ma sublimissime région du Sine Saloum.
Même si le vieux lézard ne s'y arrête plus trop souvent, je passe donc devant l'incontournable "baobab sacré" de Fadial...
Je m'abstiens de critiquer, de me moquer; on y est tous passé! Nous sommes tous, un jour ou l'autre, entré dans le ventre de cet énorme arbre multicentenaire, nous avons tous palabré avec les antiquaires, rigolé, ronchonné, marchandé, acheté...
Le lieu a perdu énormément de son charme, de son environnement broussard. Malheureusement.
L'autre jour, ne me demandez pas pourquoi, je m'y arrête. Pas d'autocars, pas de voitures, pas un touriste à la ronde. Quelques artisans vendeurs somnolent au pied du géant ou devant leurs hideuses boutiques en béton.
La plupart me connaissent de vue. Les vieux grigous depuis des lustres!
Je m'en vais en saluer un qui m'a vendu, voici près de vingt ans, une pièce unique, rarissime, une sculpture Dogon du dix septième siècle taillée en mille neuf cent quatre vingt dix sept par un artisan de Mbissel, vieillie artificiellement par mon maquignon maquilleur d'antiquités...
Le Margouillat n'est pas rancunier!  L'artiste est sympathique et nous rions encore de ma candeur d'alors.
Pendant que mon jovial faussaire et moi faisons la conversation, une BX se gare sur le parking. La Citroën doit avoir le même âge que ma Lady. Sinon que la française est...française et dans un état plus proche du cadavérage définitif que de la résurrection miraculeuse...
En sort un grand échalas qui tente d'ouvrir les portières arrières...disons...récalcitrantes...
Après quelques tentatives, quelques coups de pied, s’extrait, tant bien que mal, un couple de toubabs plus très frais. L'âge, mais aussi le voyage dans cette drôle de machine roulante non climatisée, aux vitres bloquées collées, soudées, fermées, remontées depuis Wade, voire Diouf...
Là, une fois encore, je serai sidéré de la mémoire colossale des commerçants sénégalais...

- Mon ami, je te laisse. Ces deux là sont déjà venus il y a deux ou trois ans. Marcel et Mauricette. Ma femme était contente. Avec ce que je leur ai vendu, on a pu mettre deux enfants à l'école...

En reprenant la route, je me disais qu'avec ma statue Dogon, il a pu payer la dote, épouser sa belle et faire des enfants. Chacun son tour d'aider la famille!

(aquarelle "pays Dogon" Sarah Letouzey)

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