"VOUS AVEZ UN MESSAGE"

Un message sort le reptile de sa torpeur.
Juste un léger "tink" me révèle que le facteur virtuel est passé.

J'aimais bien André, le gentil gros bonhomme qui déposait le courrier et le journal dans la boîte aux lettres de mes parents.
Avec capote, casquette et sacoche, il grimpait les quelques marches pour se pencher et introduire les "nouvelles du jour" dans l'orifice de la porte d'entrée.
Parfois, il sonnait. Il avait soif, envie de papoter en réclamant une signature.

"Bonjour Gisèle ! Salut Lazare ! J'ai un recommandé... et j'boirais bien un coup !"

C'était mieux avant, hein !?!
On se saluait, on s'appelait par son prénom. On prenait temps et soin des nouvelles; d'afficher un sourire...

Au Sénégal, du moins là où je vis, il existe une poste au village principal de l'entité. Pas de facteur itinérant mais une organisation informelle étonnante qui conduit le plus souvent le pli à bon port.
Les détours sont parfois étourdissants sinon, qu'ici, rien n'étonne personne.
Et, si une chèvre mange le courrier, si le vent l'emporte... c'est "Graoul" ! C'est pas grave !
Il en viendra un autre, inch Allah...

Je m'égare...
Où en étais-je ?

J'ouvre ma boite "courriel", comme on dit en France.
Une lectrice s'étonne que je n'écrive pas un papier sur le sacre du nouveau Président, sur les soixante quatre ans d'indépendance du pays de Senghor.

Autant je m'intéresse nettement plus à l'actualité du Sénégal qu'à celle du pays de ma naissance, autant j'ai horreur de me mettre les doigts dans le cambouis !

Quel que soit le mécanicien, le rouage ou même le bruit du moteur... Je n'y connais rien et la saleté me rebute !
Comprenne qui voudra et basta !

Quant aux 64 printemps du Sénégal libre... S'il y a des progrès, relisez les différentes définitions du mot et trouvez votre bonheur, vos satisfactions par vous-même...

Le Sénégal du lézard n'est qu'une sensation qui lui plaît. Ne cherchez pas, chez le reptile, autre-chose que le bonheur.
C'est terriblement personnel, le bonheur !

illustration Silas Adelanke Adeoye