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La Lorgnette du Margouillat

EN ATTENDANT L'AURORE

EN ATTENDANT L'AURORE

Il est cinq heures. Paris s'éveille, s'ébroue, grouille, râle, grelote depuis une heure déjà.
Le décalage horaire entre la Toubabie hexagonale et l'île au diable, ici, dans le Saloum, est tellement incongru!
Quelle impertinence de penser à Paris alors que là où j'entends battre la nuit africaine, Lanzmann et Dutronc n'ont même jamais existé.
Les mout-mout ont abandonné l'île depuis que le vent les en a chassé. Saloperie de moustiques!
Je me suis demandé pourquoi Dieu avait créé une bestiole aussi inutile, nuisible, mortelle et emmerdante...jusqu'à ce que l'évidence m'accable.
Le margouillat raffolent de cet insecte...
Le postérieur heureux posé sur le sable, je regarde la nuit. J'écoute le silence.
Le petit phare de Moundé, loin, très loin, tente stupidement de rivaliser avec la voûte céleste. Quelle prétention!
Il fait nuit noire. La lune doit avoir un rendez-vous ailleurs...
Venant sans doute de Diakhanor, le moteur d'une pirogue ronronne dans le bolong. Lampe verte, lampe rouge approchent, passent, s'en vont.
J'imagine un piroguier partant relever ses filets de crevettes avant l'aube.
J'allume une Excellence à la braise endormie du feu de la soirée.
Les étoiles pâlissent doucement. Des contours apparaissent imperceptiblement. Une chouette hulule en regagnant son nid.
L'humidité et le vent s'allient pour me faire frissonner. Il est temps de ranimer le feu.
Quelques touffes d'herbe sèche suffisent. La flambée danse dans la nuit. L'aurore s'en vient.
La minuscule pirogue à voile du "gardien de l'île" glisse le long du rivage, silencieuse, humble. Tellement.
Je lui propose mon aide. Quel drôle de toubab! Venir dormir là, se lever avant l'aube et vouloir aider!...
Son bac doit peser dans les trente kilos. Des crevettes superbes!
Plus tard dans la matinée, une autre pirogue viendra chercher la rançon de la nuit. Caisson frigolite, lit de glace, balance.
A Ndangane, une camionnette attend le ramassage de la tournée des îles. Les crustacés font doubler, tripler, quadrupler de prix...
La marée monte lancinante, réglée comme une horloge. Les aigrettes ardoisées chassent les crabes et la fraie.
Les sternes plongent, les hérons guettent depuis les palétuviers.
La jour se lève. Le soleil attend, s'impatiente du réveil de ma petite troupe d'"aventurières" pour montrer le bout de son nez.
Trop tard! L'astre est pressé de réchauffer la terre.
Quel spectacle! Rouge, orange, jaune puis, presque blanc. Crevant les quelques nuages prétentieux, la brume du delta. Magistral!
La faune, la flore s'ébrouent. Quelques pirogues vont et viennent dans le delta.
La fille du "gardien de l'île" vient laver sa peau et la vaisselle dans l'onde, à peine masquée par un bouquet de palétuviers en nurserie.
Elle est belle, son sourire est si pur, la vaisselle tellement modeste...

"C'était la fille du Père Noël, j'étais le fils du père fouettard, elle s'appelait Marie-Noëlle, je m'appelais Jean-Balthazar"...
Fichus Lanzmann-Dutronc!

(Aquarelle Sophie Bouet)

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I
..ah; tu me fais penser a un film: mossane. ça se passe dans le sine. elle est belle et se lave elle aussi dans un bolong. aller lezard, continue chez les nounours, c est aussi ça le senegal.