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La Lorgnette du Margouillat

LE VOYAGE DU SÉNÉGALAIS

LE VOYAGE DU SÉNÉGALAIS

D’arbre en pirogue, un voyage en soi...

« Tout homme est tiraillé entre deux besoins, le besoin de la Pirogue, c’est-à-dire du voyage, de l’arrachement à soi-même, et le besoin de l’Arbre, c’est à dire de l’enracinement, de l’identité.
Et les hommes errent constamment entre ces deux besoins en cédant tantôt à l’un, tantôt à l’autre; jusqu’au jour où ils comprennent que c’est avec l’Arbre qu’on fabrique la Pirogue ».
Marie-Fanny Subert

Ce mythe mélanésien de l’île du Vanuatu, ce proverbe d’Océanie, je l'ai découvert grâce à l'aquarelle de Valérie Weishar Giliani. Quelle belle idée a eu la Lorgnette de s'imposer des aquarelles pour enluminer les petits papiers du Margouillat!
C'est un ravissement que de chercher quotidiennement de quoi illustrer mes propos.

Hier, Ngoné me racontait son voyage au Auchan de Mbour, son rêve de voir Paris. Voici peu, je vous racontais l'accouchement, la naissance d'une pirogue.
On tourne en rond...

On dit le sénégalais voyageur. Si j'occulte tous ceux qui prennent le large clandestinement, au risque de leur vie, si j'exclus tous ceux qui disent voyager parce qu'ils s'en vont à quelques dizaines de kilomètres pour un décès, un baptême, un mariage, un fatiguement administratif, il n'y a plus grand monde.
Un peu plus de cinq cent mille sénégalais vivent hors du pays. La diaspora. Combien d'entre eux voyagent encore réellement?
Je crois que ce mythe du sénégalais voyageur vient d'abord du vocabulaire. Ici, on ne dit pas "je vais à Mbour", on dit "je voyage!". Parfois on précise le lieu, rarement éloigné du village.
Le second facteur est sans doute la durée, le moyen de transport. et les vicissitudes typiquement typiques au pays de la Téranga...
S'il faut une heure trente à la Vieille Anglaise pour gagner Mbour, comptez minimum trois heures si vous prenez un "taxi", un car dit "rapide".
Souvent, il faut changer. Jakarta jusqu'à Fimela ou Samba Dia avant la grande aventure de trouver une voiture, un car, un stop. Arrêt à Joal ou Ndiosmone. Rares sont ceux qui vont plus loin...
Amoul correspondance!
De ces deux bourgs, on peut rejoindre "rek direct" Mbour.
Vous débarquez dans la cité de Bombardier et de Viviane Ndour après un long voyage sardiné, fumé, serré, transpiré. Après avoir évité dix fois le cadavérage, stoppé deux ou trois fois par les racketteurs en képi, attendu au bord du goudron qu'on répare le pneu fatigué...
On peut donc comprendre mieux que ces soixante kilomètres deviennent un voyage. Voire une galère, un périple, une expédition...une odyssée!

Et dire que le Père Georges chantait:
"Auprès de mon arbre je vivais heureux
J'aurais jamais dû m'éloigner de mon arbre
Auprès de mon arbre je vivais heureux
J'aurais jamais dû le quitter des yeux"

Vous ai-je déjà conté qu'à Mbin Diakar, le vieux lézard vit, enraciné entre deux baobabs?

(aquarelle Valérie Weishar Giliani)
Référence: https://blog-and-the-city.com/darbre-en-pirogue-un-voyage-en-soi/

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