FATOUMATA

- Recentre-toi Margouillat ! C'est bien joli de nous édifier sur Lamartine, Beaucarne et consorts mais, nous, on te lit pour tes billets sur le Sénégal !

C'est, en substance, le message que m'ont envoyé certains.

Oui, mais non !
Je ne suis pas un nègre blanc ! Du moins en ce qui concerne "La Lorgnette du Margouillat" !
J'écris suivant mon humeur, l'opportunité d'une rencontre, d'une anecdote, d'une tendresse, d'une colère. D'un souvenir, d'un lieu, d'une écoute, d'une lecture. D'une émotion.

Mon dernier émoi est Burkinabé; j'ai rencontré Fatoumata. Virtuellement.

On en parle peu - trop peu - de ce qui se déroule au Burkina Faso. A peine mille huit cent kilomètres séparent Dakar de ce pays frère où la lèpre de l'islamisme gagne chaque jour du terrain. La violence dans l'ancienne Haute Volta est au delà de ce que racontent les médias qui, étrangement, préfèrent axer leurs infos sur le Covid et le dernier chapeau de la reine d'Angleterre plutôt que sur les victimes au RDC, au Burkina, au Mali entre autres...qui font tellement plus de morts que la pandémie dans le monde.

La Maman de Fatoumata, une de ses soeurs ont été violées, assassinées l'an dernier. Le père est en fuite en Côte d'Ivoire et, la jeune femme de vingt quatre ans a abandonné ses études, la concession familiale pillée et tout espoir de vivre encore dans son pays.
Son seul but désormais, fuir à Dakar où vit une tante chirurgien dentiste fortunée.
Sauf que tantine ne veut pas de Fatoumata !
Le famille est maudite, maraboutée; elle ne veut pas que la poisse vienne anéantir sa carrière et ruiner son bel appartement aux Almadies.
La solidarité Africaine a désormais beaucoup trop de sable dans sa mécanique pourtant réputée... Le dégraissage fait grincer les rouages de la fraternité. Assourdissant !

Le vieux lézard n'est hélas d'aucune utilité financière envers la jeune femme; juste une écoute, quelques renseignements pratiques, une stratégie, un rire, un encouragement. Aucune promesse, surtout !
Elle m'apprend son pays, je lui raconte le Sénégal. Les émotions sont là. C'est bien.
Pas de supplique, rien de malsain; juste de quoi s'accrocher.

illustration Mauro Cano