ALLEZ PAÎTRE AILLEURS !

Pour clore les dernières chroniques ayant pour thème la vadrouille libertaire des animaux, le vieux lézard vous conte l'"anecdote" suivante.
Un simple exemple de cohabitation difficile entre l'Afrique d'hier et celle de demain.

Non loin des carrières de Toglou, entre Kirène et Sébikothane, une piste "millénaire" de transhumance des troupeaux de zébus.
Nous ne sommes pas dans les nuées du Fouta Toro mais, depuis "la nuit des temps", des centaines de bovidés empruntent cette passe chaque année.
Un jour, l'homme décide de décentraliser l'aéroport de Dakar à Diass et de le relier à la capitale par une autoroute. On ne parle pas encore du TER en ces temps-là...

Spéculations foncières, expropriations, accaparements, déguerpissements.

Quelques habitants s'inquiètent, alertent; quelques bergers demandent un "passage" pour les troupeaux.
Suggèrent une passerelle adaptée, un tunnel.
Présidence et Eiffage lèvent les yeux au ciel, font la sourde oreille.
Inimaginable de dépenser quelques centaines de millions pour quelques zébus! "Qu'ils aillent paître ailleurs !"
L'autoroute est sécurisée; clôturée, murée, filbarbelée !

Aujourd'hui, les murs sont abattus, les treillis éventrés quasi chaque semaine. Les zébus se retrouvent sur l'autoroute. Accidents, dégâts, morts.
Procès contre Sénac; des milliards de dédommagement réclamés, restaurations, travaux, caméras et personnel de surveillance. Tout ça pour quelques bergers, quelques centaines de zébus...
Par les brèches, évidemment, passent enfants, adultes, chiens, chèvres. Même quelques dépanneurs mécaniques...

Qui ne connait l''indiscipline des sénégalais, leur incivisme !?!

Les hommes d'État, les hommes d'affaires n'ont jamais été des poètes, des romantiques, des contemplatifs émus; ça se saurait !

Illustration Oumar Ball